Une transaction Bitcoin est l’action fondamentale qui permet de transférer de la valeur sur le réseau Bitcoin. En substance, une transaction correspond à un ensemble de données qui dépense un certain montant de Bitcoin depuis une ou plusieurs adresses et le réattribue à de nouvelles adresses. Chaque paiement Bitcoin on-chain envoyé ou reçu est enregistré en tant que transaction sur le registre de la blockchain. Lorsque Alice envoie 1 BTC à Bob, elle crée une transaction qui fait référence à ses outputs non dépensés (UTXO - Bitcoins qu’elle possède issus de transactions précédentes) et assigne cette valeur à un nouvel output contrôlé par l’adresse de Bob. Cette transaction est alors diffusée sur le réseau Bitcoin, vérifiée par les nœuds et les mineurs, et – une fois incluse dans un bloc – devient une partie permanente de la blockchain.
Il est utile de visualiser une transaction Bitcoin non pas comme un déplacement de pièces physiques d’un compte à un autre, mais plutôt comme la mise à jour d’un registre de propriété. Bitcoin repose sur le modèle UTXO (Unspent Transaction Output). Le registre est donc un ensemble d’outputs issus de transactions passées qui n’ont pas encore été dépensés (les UTXOs, qui correspondent en quelque sorte à des “fragments” de Bitcoin contrôlés par quelqu’un). Une transaction prend certains de ces UTXOs comme inputs, les marque comme dépensés et crée de nouveaux UTXOs en outputs vers le(s) destinataire(s). Chaque output comporte un montant de BTC et un script de verrouillage (le plus souvent représenté par une adresse) qui définit qui pourra le dépenser ensuite. Chaque input d’une transaction doit référencer un output précédent (par son ID de transaction et son index d’output) et fournir une signature valide pour le débloquer. En termes simples : les inputs sont la source des fonds, les outputs en sont les destinations. Ce mécanisme est la clé de la sécurité et de la traçabilité de Bitcoin : chaque unité de BTC peut être tracée à travers une chaîne de transactions jusqu’à sa création (récompense de minage).
Lorsque vous utilisez un wallet Bitcoin pour envoyer des BTC, le logiciel du portefeuille agrège généralement certains de vos UTXOs (vous pouvez par exemple avoir deux UTXOs de respectivement 0,6 BTC et 0,5 BTC, et vouloir envoyer 0,7 BTC – le wallet les utilisera comme inputs), signe la transaction avec vos clés privées et crée des outputs, notamment l’adresse du destinataire (pour 0,7 BTC dans cet exemple) et un “rendu” vers votre adresse pour le reste (0,4 BTC dans cet exemple, moins les frais). Cet ensemble de données – inputs, outputs, signatures et quelques autres champs – constitue le format d’une transaction Bitcoin.
Les principales caractéristiques des transactions Bitcoin :
- Elles sont identifiées par un identifiant de transaction (TXID), qui est un hash des données de la transaction. Le TXID sert d’identifiant, pour retrouver la transaction dans la blockchain.
- Chaque transaction a une taille (en octets) et engage donc des frais en fonction de cette taille. Les utilisateurs ajoutent des frais pour inciter les mineurs à inclure leur transaction dans un bloc.
- Les transactions peuvent comporter plusieurs inputs et outputs. Les inputs multiples servent généralement à combiner plusieurs UTXOs pour atteindre le montant souhaité. Les outputs multiples sont utilisés pour payer plusieurs destinataires dans une seule transaction (par exemple régler deux personnes d’un coup) ou, plus fréquemment, pour envoyer une partie au destinataire et une autre partie en rendu sur votre propre adresse.
Comment les transactions Bitcoin sont-elles confirmées ?
Lorsque vous diffusez une transaction Bitcoin (ce que fait automatiquement votre wallet en la transmettant aux nœuds du réseau), elle entre dans le “mempool” du réseau Bitcoin – un espace de mémoire où attendent les transactions non confirmées. La transaction est alors en attente de confirmation : elle attend qu’un mineur l’intègre dans un bloc. Les nœuds complets valident de manière indépendante l'authenticité de la transaction : ils vérifient que tous les inputs correspondent à des UTXOs existants et non encore dépensés, que les signatures sont valides (prouvant que l’expéditeur est bien autorisé à dépenser ces fonds), et que toutes les règles sont respectées (par exemple : la somme des inputs ≥ la somme des outputs, pour garantir qu’aucun Bitcoin n’est créé “magiquement”). Si la transaction passe la validation, elle reste dans le mempool. Si elle est invalide (tentative de double dépense, frais insuffisants…), les nœuds la rejettent et elle ne sera pas propagée.
Les mineurs sélectionnent alors des transactions dans le mempool pour former un bloc candidat. Ils priorisent généralement selon le taux de frais (en satoshis par octet) : les transactions avec les frais les plus élevés sont sélectionnées en priorité, car les mineurs disposent d’un espace de bloc limité et souhaitent naturellement maximiser leurs revenus issus des frais. Lorsqu’un mineur valide un bloc (en résolvant le puzzle de proof-of-work), ce bloc – regroupant plusieurs transactions – est diffusé sur le réseau. À cette étape, toutes les transactions de ce bloc sont considérées comme confirmées (1 confirmation). Chaque nouveau bloc ajouté à la chaîne augmente le nombre de confirmations et solidifie l’immuabilité de la transaction. Au bout de 6 confirmations, une transaction est généralement considérée comme irréversible, le risque de réorganisation de la chaîne étant alors extrêmement faible.
Il est fondamental de noter qu’une fois qu’une transaction est confirmée, ses inputs (UTXOs) sont considérés comme dépensés et ne peuvent plus être utilisés. Ses outputs deviennent de nouveaux UTXOs, pouvant à leur tour servir d’inputs à de futures transactions. C’est ainsi que la “propriété” du Bitcoin avance : en transférant transitivement le droit de dépenser un output d’un propriétaire au suivant via des transactions en chaîne.
Flux d'une transaction Bitcoin (source)
Frais de transaction et rapidité
Toute transaction Bitcoin comporte des frais réseaux, généralement à la charge de l’expéditeur. Le calcul est simple : Somme des Inputs – Somme des Outputs (la différence étant le frais prélevé par le mineur). Par exemple, si vous dépensez des inputs pour un total de 1.0 BTC et vos outputs totalisent 0.998 BTC pour diverses adresses, le reste, soit 0.002 BTC, constitue le frais miné. Les frais ne sont pas fixes ; ils sont définis par l’utilisateur, selon la congestion du réseau et la rapidité de confirmation souhaitée. Chaque bloc ne peut contenir qu’environ 1 à 2 Mo de transactions (soit 2 000 à 4 000 transactions en moyenne). Ainsi, la capacité du réseau Bitcoin reste limitée, et les utilisateurs sont en concurrence lors des périodes à forte demande.
En cas de congestion réseau (nombre élevé de transactions en attente), les frais augmentent et les transactions à faible frais peuvent subir de longs délais. Ainsi, lors des pics d’activité, les délais de confirmation peuvent fortement s’allonger. Exemple notable : en mai 2023 et à nouveau en juillet 2024, des hausses massives du volume de transactions ont entraîné un engorgement de mempool. Le 19 juillet 2024, le temps de confirmation moyen a frôlé les 23 heures, avec plus de 116 000 transactions bloquées, à cause d’une rude concurrence pour l’inclusion dans les blocs. Quelques jours plus tôt, avec une demande plus faible, le délai moyen était d’environ 1 heure – preuve de la volatilité des conditions réseaux. Les utilisateurs surveillent donc le marché des frais et fixent un niveau de frais adapté à l’urgence de leur transaction. Les portefeuilles modernes suggèrent généralement les frais optimaux ou proposent un choix “éco” ou “prioritaire”.
Le frais d’une transaction dépend aussi de sa taille en octets, et non uniquement du montant transféré. Une transaction avec de nombreux inputs ou des scripts complexes (type multi-signature) occupera plusieurs centaines d’octets et nécessitera donc des frais plus élevés pour atteindre le même feerate (sat/B) qu’une transaction plus légère. Des optimisations comme Segregated Witness (SegWit), introduit en 2017, ont augmenté la capacité utile des blocs et réduit la “poids” de certains champs (signatures), permettant ainsi plus de transactions pour le même plafond de 1 Mo. Aujourd’hui, la plupart des transactions utilisent SegWit, maintenant ainsi les frais plus bas à demande égale. L’évolution suivante, Taproot (activée en novembre 2021), a davantage optimisé certains types de transactions et de smart contracts, même si son effet sur la pression des frais reste indirect (en rendant certaines opérations complexes plus efficaces en termes de données).
Pour les utilisateurs recherchant plus de rapidité ou de scalabilité, Bitcoin prend en charge les solutions de seconde couche (layer 2). La plus populaire est le Lightning Network, qui permet d’ouvrir des canaux de paiement sur la blockchain, puis de réaliser de nombreuses transactions instantanées hors chaîne entre utilisateurs (le règlement final ayant lieu on-chain lors de la fermeture des canaux). Les transactions Lightning ne figurent pas dans la blockchain, sont quasi-instantanées et à très faible coût – idéales pour les paiements petits ou rapides que les frais on-chain ou le temps de confirmation rendent peu pratiques. Néanmoins, Lightning a ses propres spécificités et n’élimine pas le rôle des transactions on-chain – l’ouverture et la fermeture de canaux sont toujours sur la chaîne principale.
Cycle de vie d’une transaction Bitcoin (étapes clés)
Résumé du parcours type d’une transaction Bitcoin :
- Création : Le wallet de l’utilisateur construit une transaction en sélectionnant un ou plusieurs UTXOs suffisamment élevés pour couvrir le montant à envoyer plus les frais. Il définit alors les outputs – généralement un output pour le destinataire et, si nécessaire, un rendu vers l’adresse de l’expéditeur. Chaque output correspond à une quantité de BTC “verrouillée” par un script lié à l’adresse cible (souvent : seul le détenteur de la clé privée de cette adresse peut dépenser ce Bitcoin).
- Signature : Le portefeuille utilise la clé privée de chaque adresse d’input pour générer une signature numérique placée dans le champ scriptSig (ou witness pour les transactions SegWit). Cette signature prouve que l’utilisateur possède bien ces fonds et autorise leur dépense. Sans toutes les signatures valides, la transaction sera rejetée.
- Diffusion : La transaction signée (ensemble d’octets généralement sérialisés au format hexadécimal) est diffusée sur le réseau peer-to-peer Bitcoin. Elle se propage rapidement aux nœuds du monde entier. À chaque réception, un nœud effectue des vérifications (syntaxe, existence et état des inputs, validité des signatures). Si elle est valide, il la relaie et l’ajoute à son mempool de transactions en attente.
- Attente dans le mempool : La transaction patiente dans le mempool mondial avec d’autres transactions. Elle est encore en attente. Les wallets affichent un statut “non confirmée”. Elle attend simplement d’être sélectionnée par un mineur.
- Minage et confirmation : Un mineur sélectionne la transaction pour son bloc, en fonction du niveau de frais. Lorsqu’il trouve le bon proof-of-work, le bloc est diffusé et validé par les nœuds, qui acceptent ainsi toutes les transactions qu’il contient. La transaction est alors confirmée, inscrite dans la blockchain à un certain niveau de bloc, et ses outputs deviennent dépenser par les nouveaux propriétaires (la plupart des wallets attendent toutefois plusieurs confirmations avant de considérer ces fonds “prêts à être dépensés”).
- Confirmations ultérieures : Chaque nouveau bloc ajouté à la chaîne augmente le nombre de confirmations. Plus il y a de confirmations, plus le risque de réorganisation est faible (ce dernier ne se produit que si une réorganisation de la chaîne survient, ce qui exige un événement rare tel qu’une attaque 51%). Avec un temps de bloc moyen de 10 minutes, il faut généralement une heure (6 blocs) pour qu’une transaction soit considérée comme irréversible par les plateformes et marchands.
Réseau Lightning Bitcoin (source)
Cas particuliers et évolutions récentes
Au-delà des transactions Bitcoin standards, il existe quelques cas particuliers :
- Transaction coinbase : À ne pas confondre avec la plateforme Coinbase : la transaction coinbase est la première transaction de chaque bloc, celle qui “crée” de nouveaux bitcoins (la récompense de bloc) pour le mineur. Elle n’a aucun input (puisqu’elle “frappe” de la nouvelle monnaie) et possède un ou plusieurs outputs (versement de la récompense au mineur). Les utilisateurs classiques ne créent pas ce type de transaction, seuls les mineurs lors de la création d’un bloc en sont à l’origine.
- Transactions multi-signature : Certains outputs requièrent plusieurs signatures pour être dépensés (exemple : adresse 2-de-3). En cas de dépense, la transaction comportera plusieurs signatures dans l’input, chacune correspondant aux clés requises. C’est simplement un script de verrouillage plus complexe sur l’output et un script de déverrouillage équivalent à l’input. Idéal pour la gestion partagée ou une sécurité renforcée.
- Batching : On voit fréquemment (notamment chez les exchanges ou services) le regroupement de paiements : une transaction unique comprend plusieurs outputs vers différents bénéficiaires. Ceci optimise les frais globaux (partage de la taille entre plusieurs paiements).
- Outputs SegWit et Taproot : Les adresses Bitcoin modernes (bech32 débutant par bc1…) utilisent SegWit, qui a déplacé les signatures hors des blocs principaux via la structure dites “witness”, réduisant les frais. Taproot (adresses bc1p…) autorise des conditions complexes comme les Schnorr signatures ou MAST. Pour l’utilisateur, cela reste “translucide” – la manipulation est identique, seuls les scripts et la vérification sont améliorés en arrière-plan.
Dans l’actualité récente, l’utilisation des transactions Bitcoin a dépassé le simple transfert de valeur. Dès 2023, le protocole Ordinals est apparu, permettant aux utilisateurs d’incorporer des données arbitraires (images, texte, soit des NFT appelés “inscriptions”) directement dans les données witness d’une transaction. Cela a déclenché une vague de transactions pour la frappe et le transfert de ces artefacts numériques. Résultat : congestion extrême et flambée des frais sur le réseau Bitcoin. Sur un an, le coût moyen par transaction a été multiplié par plus de 25× à cause de la popularité des Ordinals et des tokens BRC-20 utilisant la blockchain Bitcoin. Ce phénomène a suscité le débat quant à la légitimité de ces usages, mais a aussi montré que les transactions Bitcoin peuvent servir de véhicule pour des actifs numériques, en tirant parti de la sécurité de la blockchain. Toutefois, cela a servi de rappel : la couche principale de Bitcoin a un débit limité, et tout usage saturant les blocs (finance ou non) entraîne une hausse généralisée des frais. L’architecture du réseau vise la décentralisation et la sécurité avant le débit transactionnel : ainsi, l’échelle quotidienne doit se traiter via des solutions layer-2 comme Lightning, la couche de base restant réservée aux règlements et transferts de grande valeur.
Bitcoin SegWit (source)
Conseils pour l'utilisation des transactions Bitcoin
Pour l’utilisateur lambda, comprendre certains aspects techniques permet d’utiliser Bitcoin plus efficacement et en toute sécurité :
- Sauvegardez toujours votre wallet, c’est-à-dire vos clés privées ou votre phrase de récupération. Les transactions étant irréversibles, la perte ou le vol des clés implique également la perte définitive de vos fonds.
- Consultez les frais avant d’envoyer. En période normale, une confirmation prendra 10-20 minutes avec de petits frais, mais lors de pics (lors d’un engouement pour des meme tokens ou un drop NFT sur Bitcoin), il faudra soit payer bien plus cher, soit accepter d’attendre plusieurs heures voire un jour. Des estimateurs de frais sur le web ou dans les wallets peuvent vous guider.
- Utilisez le batching si vous devez payer plusieurs adresses, ou le réseau Lightning ou d’autres sidechains pour des paiements fréquents ou de faible montant. Cela réduira vos frais et limitera la congestion sur la blockchain principale.
- Sachez que toutes les transactions Bitcoin sont publiques. N’importe qui peut retrouver une transaction via son TXID sur un explorateur de blocs et voir les adresses et montants concernés. Les adresses Bitcoin sont pseudonymes (pas liées à une identité), mais les flux de fonds peuvent parfois être tracés. À cet effet, des techniques comme CoinJoin ou le mixage permettent d’améliorer la confidentialité.
- Si une transaction reste bloquée (non confirmée, frais trop faibles), vous pouvez utiliser RBF (Replace-By-Fee) si votre wallet le propose, pour augmenter les frais, ou CPFP (Child Pays For Parent), via une nouvelle transaction rattachée qui paie un frais élevé afin d’inciter les mineurs à inclure les deux. Ce sont des méthodes avancées de gestion des frais.
- Vérifiez toujours soigneusement l’adresse d’envoi ! Les adresses Bitcoin sont longues et complexes ; préférez l’utilisation de QR codes ou le copier-coller offert par les wallets modernes. Attention aux malwares qui interceptent le presse-papiers. Une transaction n’est jamais annulable : une erreur d’adresse est irréversible.
Pour conclure, la transaction Bitcoin est l’opération atomique qui fonde toute l’économie de Bitcoin – de la toute première transaction, où Satoshi Nakamoto envoya 10 BTC à Hal Finney le 12 janvier 2009, jusqu’aux millions de transactions quotidiennes actuelles. Elle incarne une symbiose entre la cryptographie (signature garantissant la propriété), les systèmes distribués (réseau pair-à-pair) et l’incitation économique (frais et confirmation via minage). Comprendre le fonctionnement des transactions explique pourquoi Bitcoin est sécurisé et reste décentralisé : aucune autorité centrale ne “valide” vos paiements – ce sont les nœuds et les mineurs qui appliquent les règles et inscrivent vos transactions sur le registre mondial, à condition de respecter le protocole. Tout utilisateur de Bitcoin, en créant et diffusant des transactions, participe ainsi à la création de ce grand registre universel de la valeur.





